Quand tout goûte trop amer

Deuil en cours
Les traumatismes importants font surgir des choses auxquelles on ne s’attend pas. Je suis une lectrice avide de fiction en tout genre et ça a adonné, étrange coïncidence, que plusieurs des livres que j’ai lus dans la dernière année abordaient un ou plusieurs aspects du deuil. L’intensité de mes émotions ainsi que leurs effets depuis que la mort de Clément sur mes habitudes ne m’ont donc pas forcément surpris. Je n’étais quand même pas préparée du tout à vivre les derniers moments de mon précieux compagnon à quatre pattes! Néanmoins, j’avais un bagage de prêt sur lequel m’appuyer lorsque le sol s’est écroulé sous mes pieds, bien que certaines réactions m’ont étonné. Par exemple, le temps que ça m’a pris avant d’arriver à savourer une barre chocolatée, moi qui, les personnes me connaissant bien le savent, suis l’incarnation même d’une « bébitte » à sucre! Je mange du chocolat sur une base régulière et, pourtant, ce fut une des dernières choses que j’ai eue envie de manger. Cela m’a pris plusieurs jours avant de ressentir l’envie d’une collation chocolatée.

Ce n’est pourtant pas quelque chose de fondamentalement associé à mon vieux chaton, sauf peut-être le fait que je devais faire bien attention de ne pas laisser traîner de miettes de chocolat, comme cela peut être fatal pour nos amis félins ! Pas que cela intéressait Clément, non tout le contraire, c’était seulement pour prévenir l’ingestion accidentelle que je prenais des précautions lorsque j’en mangeais ou lorsque je cuisinais avec du cacao et du chocolat. Peut-être est-ce parce que j’associe le chocolat à la joie et au plaisir… mais encore là, la déprime ne m’a jamais empêché d’en dévorer avant, c’est même tout l’opposé habituellement, entendons-nous. Je ne pensais pas un jour être si chamboulée que l’idée de savourer un délicieux morceau de chocolat et de sucre ne me tente pas du tout et me révulse presque! Incroyable, mais fait vécu, il existe quelque chose d’assez troublant pour me faire éviter le chocolat et le sucré…

Je vous rassure tout de suite, passé le choc de la première semaine, j’ai repris ma consommation de sucre. Ça s’est fait peu à peu et j’ai maintenant envie d’un petit truc sucré ici et là. Par ailleurs, je n’ai pas encore trouvé la force et l’envie de préparer de savoureux desserts. Qui sait, en fin de semaine, cela pourrait être le moment de renouer avec une de mes activités favorites. Je ne suis pas prête à me mettre de la pression pour le faire. Ce n’est pas un objectif, juste un souhait, car les activités dans la cuisine me rappellent encore trop son absence. Bien que Clément n’était pas tout le temps présent dans la cuisine quand j’étais aux fourneaux, pas aussi constant que lorsque je lisais, il n’était jamais très loin surtout lorsque nous ouvrions le réfrigérateur. Il traînait donc dans nos pattes bien souvent pendant que nous cuisinions. C’est presque surprenant qu’il n’y ait pas eu plus d’incident dans la cuisine tellement il avait le don de s’approcher sans bruit et de s’installer juste derrière nous à notre insu. Notre chaton aimait aussi tout sentir, bien qu’il n’était pas intéressé par la majorité de ce que je préparais, sauf les pains et les confections dont l’un des principaux ingrédients étaient du beurre ou des oeufs. Il figure ainsi dans beaucoup de nos photos de bouffe. Vous comprendrez sans doute que l’envie de tester une nouvelle recette ou de confectionner une de mes classiques me déserte pour l’instant.

Clément le chat se lèche une patte avant couché sur la table, mais pourtant il n'a pas touché au gâteau roulé au chocolat couvert de sucre à glace qui se trouve en avant plan.

Ça prendra le temps qu’il faut et je reste confiante ; j’y reviendrai un jour pas si lointain. Je n’ai pas besoin de compléter toutes les premières fois possibles dans le mois suivant sa mort, j’en ai déjà vécu pas mal! J’en vis constamment, jour après jour. J’ai d’ailleurs franchi une autre étape il y a deux soirs. J’ai finalement nettoé la dernière couverture sur laquelle Clément a été, celle que j’avais mis dans la boîte dans laquelle nous l’avons emmené chez le vétérinaire. Il avait fait quelques petits pipis dessus dans la voiture (conditions hivernales = quelques dérapages et Clément ne voulait pas rester couché sagement, donc il a perdu l’équilibre une couple de fois, se causant une petite frayeur au passage). C’est idiot et pourtant, je trouvais un réconfort à sentir le pipi de chat sur cette couverture… Elle est propre maintenant, bien que la sécheuse n’a pas eu raison de tous les poils de Clément qui y sont agrippés (et c’est tant mieux !).

Cette couverture était la préférée de toute de Clément, et la mienne aussi! Dès que je la plaçais quelque part, sur le futon, sur le lit, sur le divan dans le salon, mon beau chat rappliquait rapidement pour venir s’y lover. C’est celle sur la photo un peu plus bas, avec des petits renards rouquins, presque comme Clément. Petite parenthèse : les chats et les renards ne sont que de distants parents, mais l’orange de Clément et sa subtilité le rapprochaient tellement de ces beaux canins que sont les renards, Clément était par moment mon petit lion, mon beau renard, mon grand chaton. Je vais la chérir encore longtemps cette doudou et je penserai à mon chat tout doux chaque fois que je l’enroulerai autour de moi.

Honnêtement, je pensais la laver bien plus tôt cette couverture. Toutefois, chaque fois que je m’apprêtais à le faire, je ne m’en sentais pas capable. Je ne me suis pas poussée, car je m’étais déjà occupée de tellement des choses de la vie de mon vieil ami que je ne m’inquiétais pas de me raccrocher un peu plus longtemps à celle-ci. Et maintenant, c’est fait! Et maintenant, des éléments exclusifs de son quotidien ou associés directement à ces derniers moments auprès de nous, il en reste très peu… Sa gamelle est vide, mais pas rangée encore, tout comme le contenant de plastique de sa nourriture, presque plein. Je n’ai pas non plus rangé ses jouets, il en traîne un peu partout, surtout loin des regards étant donné que la majorité de ses jouets est dissimulée, cachée sous le divan ou la table. Cette tâche sera sûrement une des dernières que je ferai, de façon graduelle dans les prochaines semaines ou mois.

Clément le chat roulé en boule sur sa nouvelle couverture préférée, doudou avec un motif illustré de renards roux et de fleurs colorés sur fond bleu marine.

C’était important pour moi de commencer à ranger assez rapidement les objets exclusivement lié à la vie de mon félin préféré pour reconnaître sa mort et limiter les rappels de sa toute récente encore existence parmi nous. Toutefois, je me suis assurée de ne pas me précipiter et de ne pas tout serrer trop vite. Le faire tout d’un coup aurait été lourd et douloureux, mais surtout j’aurais senti que j’effaçais les traces de son passage dans nos vies et ce n’était pas le but, loin de là (comme ce blog le démontre bien). Il y a des moments où il faut arracher le diachylono d’un coup et d’autres, comme avec des points de suture fondants, où on se doit de laisser le temps faire son oeuvre.

À travers ce processus, j’essaie aussi de tenir compte du rythme de mon conjoint, parce qu’il n’y pas que moi là-dedans. J’ai mon deuil à vivre, mon conjoint à son deuil à vivre et nous avons un deuil partagé à traverser! Nos besoins ne sont pas en tout point identiques et je dois respecter cela, et vice versa. Alors, j’approche chaque étape avec délicatesse, un jour à la fois, une heure à la fois, un geste après l’autre, sans pression, avec une ferme détermination. Constater des progrès me satisfait. Pour autant, frapper un écueil ne me stresse pas. Après tout, la déprime n’est jamais très loin ; il n’y a pas eu une seule journée sans pleurs jusqu’à maintenant. Néanmoins, la joie d’avoir vécu 15 fabuleuses années avec Clément transperce la mélancolie de plus en plus fréquemment. En attendant que les jours cléments reviennent, je vais aller me rouler en boule sur notre doudou renard!

4 réponses à « Quand tout goûte trop amer »

  1. je porte toujours dans mon coeur . j’espère vous consoler si seulement je le pouvais . je suis proche de vous .

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    1. Parfois, c’est suffisant d’être juste là et d’écouter, ou dans ce cas-ci, lire. Merci d’être là pour moi Julie!

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      1. je suis touché par ta réponse

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  2. […] constater sur quantité de photos que j’ai partagées déjà et je vous ai mentionnée ici et là son entichement pour les doudous, surtout une fois que la température fraîchissait. J’ai […]

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