Des détails pour combler le vide

Deuil en cours
Après le premier raz-de-marée larmoyant qui m’a secoué suivant l’euthanasie de Clément, je me suis mise à traquer les signes de sa présence récente à travers la maison pour me rappeler qu’il y a peu, il était encore présent, se comportant suivant ses habitudes, occupant encore la majorité de l’appartement malgré sa taille modeste. Ou peut-être était-ce simplement pour combler le vide laissé par son absence soudaine… Peu importe, je cherche!

Mais où était-il ? Le premier choc a été de constater qu’il y avait si peu de poils qui traînaient dans le corridor ou sur son pouf préféré. C’est vrai qu’il était entre deux mues et ne perdait pas beaucoup de poils dans les dernières semaines, tout de même, je m’attendais à en trouver plus facilement! Et partout. Je pense que ça m’a fait paniquer un peu de ne pas trouver ce premier exemple de sa présence. Cela peut paraître comme un léger détail, eh bien, le début de mon deuil a été parsemé de cette quête de détails aussi anodins les uns après les autres.

La dernière photo que j’ai prise de Clément datait de quand ? Mon conjoint avait-il filmé récemment Clément? Moi, ça m’arrivait rarement et tout d’un coup, ces images en mouvement de notre chat bien vivant devenaient tellement importantes. Avait-il perdu l’appétit dans les derniers jours ? Je ne me rappellais pas avoir eu à remplir son bol de bouffe, mais c’était souvent mon conjoint qui le faisait ces derniers temps. M’avait-il joint pour ma lecture matinale dimanche matin ou non ? Où était disparu Tenzen, le renard en peluche, pour que je n’arrive pas à le trouver malgré mes recherches désespérées à deux périodes différentes dimanches ? Quand Clément avait-il eu dernière la chance de boire un peu lait ?

Les réponses à ces questions ont toutes été trouvées et chaque réponse m’a apporté un réconfort momentané. La dernière photo que j’ai prise de Clément date du 8 janvier. Mon conjoint avait tout récemment filmé Clément et l’avait nourri normalement dans les derniers jours. Mon vieux chaton m’avait bien rejoint dimanche matin pour lire. Tenzen s’était glissé sous le bureau dans la chambre, à un endroit où je n’avais pas regardé. Clément avait pu lappé un peu de lait le vendredi précédent son décès. Cette énumération ne représente qu’une portion de tout ce qui m’est passé par la tête dans les dernières semaines, allant de questions sur son état de santé, ses habitudes des derniers temps, les traces que nous avons de lui, la séquence des événements et son confort en fin de vie. Ces interrogations n’ont pas forcément toutes des réponses certaines, et c’est normal. Cependant, chaque morceau que je peux récupérer m’est précieux.

Dans les détails qui m’importent, j’ai réalisé le mardi ou le mercredi de la première semaine que je n’avais pas vu de moustache de félin traînant par terre depuis longtemps. Le soir même, j’ai demandé à mon conjoint de la mettre de côté, s’il en trouvait une. Peu après avoir dit cela, je regardais le tapis que nous gardions près de la gamelle de Clément pour qu’il puisse manger les pieds au chaud en hiver et qu’apercevais-je si ce n’est une belle longue moustache de bébé chat !! Ô la joie! Quel soulagement que de trouver cette petite trace si représentative de sa vie. Dans la même heure, mon conjoint en a trouvé une deuxième sur le plancher du salon. Comme quoi, il fallait juste en parler pour les dévoiler! Pour le moment, je n’en ai pas trouvé plus, mais deux, c’est déjà un bon nombre à chérir. Je leur ai trouvé un écrin parfait pour les conserver et j’y ai ajouté une griffe tombée trouvée peu de temps après.

Ces détails m’apportent un peu de joie dans ces temps sombres. Alors, je reste à l’affût des traces de Clément et, avec le temps qui nous distance du choc initial, elles semblent devenir plus visibles comme si, dans les premiers jours, la douleur et le traumatisme m’aveuglaient. Je vois maintenant des petits poils roux et blancs un peu partout, sur les couvertures, les peluches, mes vêtements, les serviettes, les sacs… et je respire mieux!

Ce blog est né en partie de cette course aux infinissimes détails. En effet, après son décès, je me suis rendue compte que j’écrivais rarement sur Clément dans mon journal papier, bien qu’il était fortement présent dans mon quotidien – sans doute était-il trop imbriqué dans ma routine pour que cela paraisse nécessaire de souligner autre chose que ses hauts-faits. Ça m’a motivé à écrire sur mon deuil et sur Clément afin de retracer ses pas dans la neige de mes souvenirs et de laisser des traces de notre très cher chat. Malgré tout, je reconnais que recomposer le casse-tête morceau par morceau ne me rendra pas ce qui me manque. Ce n’est pas la solution qui résoudra mon deuil, mais ça fait partie de ma démarche pour composer avec ma nouvelle réalité, sans la gouverne de notre petit roi adoré.

Clément le chat couché en boule sur le divan, les yeux mi-clos.
L’une des dernières photos que j’ai capturée de mon beau Clément – 8 janvier 2023.

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