Souvenir mouvementé d’un printemps passé

Tranche de Miaougraphie haute en émotion

Je vous partage aujourd’hui un épisode majeur de la vie de Clément, un épisode qui aurait pu grandement changé notre vie avec lui parce que nous avons passé à deux doigts de le perdre, littéralement. J’ai eu tellement peur cette fois-là. Sans grande surprise, je pense, c’est un événement qui me revient souvent en tête depuis sa mort. Cela a été une des première et seule fois avant son euthanasie où j’ai ressenti des émotions comparables à celle de mon deuil actuel. Bien qu’elles ont été de très courte durée comparativement, leur intensité se compare à ce que je vis maintenant. C’est sans doute une des raisons qui expliquent que, malgré ma volonté depuis plusieurs semaines de décrire cet événement, je ne m’étais pas encore assise pour le faire.  Quand j’écris, je vis ou revis au moins en partie les émotions liées aux événements que je relate. Ainsi, je n’étais sans doute pas prête à revivre cet événement dans son entièreté et peut-être que je ne le suis pas encore. Néanmoins, je m’essaie.

Voilà, cette histoire s’est passée durant le tout premier printemps de Clément. Cela faisait quelques mois déjà qu’il vivait avec nous et il avait grandi énormément. Il était très curieux et très énergique. J’oublie le moment exact, mais c’était en mai ou maximum début juin parce que nous habitions encore dans notre premier appartement, qu’il faisait déjà très chaud d’un côté, et que de l’autre, nous n’avions pas commencé à faire nos boîtes en vue du déménagement prochain. Notre premier appartement ensemble était une véritable fournaise. Il était situé au deuxième étage (ou premier pour ceux qui ne comptent pas le rez-de-chaussée) au-dessus d’une fruiterie dont le plafond était très haut. Nous avions des fenêtres que sur un des quatre murs, pas d’air climatisé, pas de ventilateur au plafond ; la circulation d’air y était juste mauvaise. Dans ce cadre, nul besoin de chaleur torride pour que nous surchauffions à l’intérieur. Nous avions donc installé les ventilateurs contre les fenêtres pour créer un courant d’air. Dans la fenêtre de la chambre, le ventilateur poussait l’air de l’extérieur vers l’intérieur, dans le salon, c’était l’inverse, il poussait l’air de l’intérieur vers l’extérieur. Pas parfait comme système, surtout que la fenêtre du salon n’était pas équipé d’un moustiquaire, mais ça aidait à tolérer la chaleur quelques temps, assez pour que nous survivions nos dernières semaines avant le déménagement.

Le ventilateur du salon était un ventilateur mural, donc sans pied. Nous l’installions donc sur une chaise ou couché sur le canapé-futon quand ce dernier était déplié en lit, placé de façon à bloquer la fenêtre ouverte complètement. Une nuit, mon conjoint pour une raison que j’oublie, avait de la difficulté à dormir au lit et a décidé de finir la nuit sur le canapé-futon. Je me suis réveillée vers 4-5 heures du matin, constatant qu’il n’était pas au lit. Je me suis levée, encore endormie, pour vérifier où il était et constatant qu’il s’était installé sur le futon, je suis simplement retournée me coucher. Néanmoins, même dans un état fortement ensommeillé, j’ai remarqué que quelque chose clochait. Je n’avais pas aperçu, pas entendu bébé chat nul part. Je me suis relevée aussitôt, inquiète, en commençant à le chercher dans ses cachettes usuelles. Plus je cherchais, plus je paniquais, aucune trace de Clément !

Puis, je me suis aperçue qu’en se couchant sur le futon, mon conjoint avait non seulement éteint le ventilateur, mais l’avait bougé sans fermer au préalable la fenêtre qui n’avait aucun moustiquaire. Ça y était, j’ai élevé le ton et commencé à appeler Clément, Clément ! Sans qu’aucun signe de mon mignon félin ne se manifestait. Cela faisant, j’ai réveillé mon conjoint, l’anxiété en hausse exponentielle. Je ne sais pas trop comment il a compris quoi que ce soit. Entre la panique et la fatigue, je ne devais pas faire tellement de sens. Néanmoins, nous nous sommes entendus, avons chaussé nos souliers, sans prendre le temps de s’habiller outre le strict nécessaire, et sommes sortis pour arpenter chacun de notre côté le bloc où nous habitions. Nous étions situés au coin de deux rues, une avenue commerciale assez passante, bien qu’à cette heure-là, il n’y avait pas un chat – littéralement, et une rue résidentielle transversale moins passante, mais quand même importante. J’ai monté cette dernière rue pendant que mon conjoint vérifiait l’avenue.

Mon coeur battait la chamade, j’imaginais tous les scénarios, je suais et pas qu’à cause de la chaleur moite d’un début d’été précoce. À quelques pas du coin de rue, j’ai commencé à l’appeler d’une voix remplie de trémolos, qui devenait de plus en plus saccadées par les sanglots. Je me voyais déjà placarder le quartier d’affiches portant la photo de mon cher chaton avec nos numéros de téléphone, puis me ronger les freins dans l’attente, dans l’inquiétude d’un jour arriver à retrouver sa trace… Je ne me souviens plus comment nous nous étions entendus pour la distance à parcourir avant de se regrouper. Honnêtement, je ne pense pas que nous nous soyons concertés à ce point. Je sais seulement qu’après avoir monté le bloc de la rue qui bordait d’un côté notre bloc d’appartement et un peu plus, j’ai rebroussé chemin, et tourné sur la rue parallèle à notre avenue pour pousser quelques recherches de ce côté, avant de redescendre vers l’appartement. À ce point, j’étais en loque, en pleurs. Je n’avais rien entendu, je n’avais vu aucun éclair roux me laissant espérer que Clément était quelque part dans les parages. J’étais désemparée, de plus en plus convaincue que nous ne retrouverions jamais notre chaton…

Mon conjoint et moi nous sommes rejoints au coin des rues de notre demeure. Il n’avait pas eu plus de chance que moi. En partageant l’absence de résultats de mon côté, j’ai commencé à déblatérer toutes mes inquiétudes et mes angoisses de ne jamais retrouver Clément, sanglotant tout du long. Mon conjoint m’a pris dans ses bras, tentant de me réconforter comme il pouvait, mais rien d’autre que trouver Clément ne pouvait me rassurer. Je faisais tellement de raffut, c’est encore étonnant quand j’y songe que j’aille entendu quoi que ce soit au-dessus de mes propres lamentations, mais voilà, j’avais bien entendu un filet de miaulement semblant provenir de la fruiterie… Voyez-vous, la fruiterie avait des étalages extérieures, de grandes boîtes étagées en bois longeant toute la devanture, qui étaient vidées chaque soir et remplies chaque matin. D’ailleurs, pendant que j’avais mon effondrement au coin de la rue, le gérant de la fruiterie avait commencé à s’affairer, bien qu’on était encore quelques heures avant l’ouverture.

N’écoutant que mon instinct, je me suis précipitée vers l’étalage d’où les miaulements commençaient à émaner, en réponse aux appels de son nom, des miaulements de plus en plus clairs, des miaulements si anxieux, si déchirants et ô combien agréables à mes oreilles ! Voyez-vous, Clément avait trouvé refuge au fin fond des étalages qui d’ailleurs, j’ai découvert ce jour-là, étaient beaucoup plus profondes que je n’aurais jamais imaginé. Malgré mes appels, notre chaton terrifié ne semblait vouloir bouger. Qu’à cela ne tienne, je n’ai pas hésité et l’ai l’extirpé de là. C’est en serrant très fort dans mes bras notre chaton tremblotant que j’ai rejoint mon conjoint, lui aussi soulagé, pour une émouvante réunion. J’en pleurais encore ; j’en riais tout autant. Nous n’avons pas traîné dehors plus longtemps, rentrant à la maison pour nous remettre tous de toutes ces émotions fortes. Quelle façon de commencer une journée ! Impossible de se rendormir après tout ce drame. Tout de même, quelle chance nous avons eue ! Que j’ai trouvé mon chaton tellement intelligent de s’être terré si près d’où il a dû chuter.

Non mais quelle frayeur ! Et mon conjoint est bien chanceux dans tout cela ; j’étais tellement fâchée contre lui d’avoir bougé le ventilateur sans fermer la fenêtre sans moustiquaire ! Si nous n’avions pas trouvé Clément, cela aurait probablement été une toute autre histoire. Mais comme nous avons retrouvé Clément et qu’il ne semblait pas blesser, cela a été facile de le pardonner surtout que je savais que l’épisode avait beaucoup secoué mon conjoint. Je pense qu’il se sentait déjà assez mal comme cela. Vous imaginez bien que j’étais vraiment contente de quitter cet appartement-là quelques semaines plus tard, surtout que l’autre appartement était un demi sous-sol d’où Clément ne pouvait chuter.

Nous ne saurons jamais comment Clément s’est retrouvé au niveau de la rue. A-t-il sauté de lui-même ? Est-il tombé, attiré par quelque chose comme un oiseau ? Mon conjoint dans son sommeil lui a-t-il fait perdre l’équilibre pendant que bébé chat rôdait autour de la fenêtre ? Comment a-t-il atterri lui qui n’atterrissait jamais sur ses pattes lorsqu’il tombait de deux pieds de haut (même pas un mètre) ? Combien de temps Clément est-il resté dissimulé dans l’étalage ? Une heure ? Deux heures ? Pas tellement plus, mon conjoint s’étant installé sur le futon peu avant l’aube. Pour ce qui est de savoir pourquoi Clément ne s’est pas manifesté lors de notre sortie initiale de l’appartement, je pense que c’est parce que nous sommes sortis presqu’en silence, échangeant peu de paroles, et en marchant très vite, chacun dans la direction indiquée. Ce n’est que lorsque nous nous sommes retrouvés après nos recherches infructueuses que nous avons passé quelques minutes à discuter (chialer dans mon cas) si près de l’étalage où il s’était réfugié. Et comme le gérant s’était déjà affairé depuis un moment, allant et venant entre l’intérieur et l’extérieur de la fruiterie, je suis convaincue que Clément a reconnu le son de nos voix ce qui l’a poussé à enfin se manifester.

Clément le chat allongé sur le canapé-futon déplié, il regarde directement l'objectif. Il est sur le bord de la fenêtre en question (bien fermée lors de cette prise de vue).
Clément allongé sur le canapé-futon déplié, sur le bord de la fenêtre en question (bien fermée lors de cette prise de vue). La photo date de juin, donc un peu avant ou après les événements décrits ci-dessus.

11 réponses à « Souvenir mouvementé d’un printemps passé »

  1. Avatar de christinenovalarue
    christinenovalarue

    🐱💔❤️‍🩹

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  2. Quelle aventure ! Et qu’elle inquiétude ! Clio s’est sauvé une fois que nous étions de passage chez la famille. Nous l’avons cherché, appelé, etc,, nous avons reculé notre départ, nous avons désespéré, il est revenu de lui-même trois jours après sa disparition, de nuit, très sale, mais ronronnant. Notre chat d’appartement s’était octroyé une belle escapade.

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    1. Toujours mystérieux ce qu’ils font durant ce temps. Quelles inquiétudes cela a dû générer durant ces trois jours sans trace de Clio !!

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      1. Certes de l’inquiétude de notre côté. Mais je crois qu’il a vécu trois jours de liberté absolue, ce qui lui manquait peut-être dans l’appartement. Il a beaucoup pleuré dans la voiture quand nous sommes

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      2. Oh ! Il avait apprécié son aventure. Il a eu de la chance de vivre cette expérience ! 🐈🩷

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  3. Je comprends tellement la frayeur que vous avez eu tous les deux face à cette disparition ! Je t’avoue que depuis mon premier chat, c’est une véritable hantise pour moi, une petite séance d’exploration suite à une fenêtre mal fermée.
    Cela m’est arrivé avec Tigrou, le chat de mon père que nous gardions avec mon frère, mais nous avons pu le retrouver trois mois après sain et sauf ! Une dame de mon quartier qui accueillait et nourrissait plein de chats l’a reconnu sur nos affiches. Un petit miracle…
    Et le début d’une belle aventure féline : pendant ses vacances, j’allais nourrir et câliner les chats dont elle s’occupait 🙂 Un pur plaisir !

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    1. Wow ! Quelle suspense ! Trois mois, vous ne deviez plus tellement y croire après tout ce temps, ton frère et toi. Que Tigrou ait été retrouvé est incroyable en soi, que cela a mené à une nouvelle amitié est fantastique ! 😸
      Je pense que le fait de cette chute inopinée de Clément soit survenu si tôt dans sa vie a sans doute amplifié les craintes qu’il se sauve et se perde qui me rongeaient. Je comprends l’angoisse. 🩷

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  4. bonjour, comment vas tu? oh la frayeur! j’ai 2 chats et je panique dès que je ne les voit plus… en général, ils dorment tranquilles dans un coin. mais je n’imagine pas ta frayeur! passe un bon jeudi et à bientôt!

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    1. Bonjour, ça va bien. On s’inquiète pour ceux qu’on aime. 🐱 Merci du passage ! 🙂

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  5. […] juste pas sortir (sauf la fois où il a sauté ou du moins, est tombé de la fenêtre, raconté ici si vous l’avez manqué)… dehors du moins, parce qu’il a cavalé dans les […]

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