Tranche de Miaougraphie, saupoudré d’un peu de deuil
J’ai déjà souligné plusieurs traits de la personnalité de Clément et quelques événements marquants de sa longue existence de félin, mais je n’ai pas osé adresser ce constat que je ne me suis pourtant jamais gênée d’adresser lorsque je discutais de mon chat avec mes proches qui le connaissaient.
En fait voilà, nous habitions avec un chat qui ne semblait pas savoir ce que c’était que d’être un chat ! Clément se croyait aussi, si ce n’est plus, humain que nous. Mon conjoint a mentionné dans l’éloge qu’il a rédigée pour la cérémonie funéraire de la fin de semaine passée que Clément est devenu notre égal au fil des années. J’ajouterais qu’il l’est devenu parce qu’il se comportait comme notre égal de bien des façons. J’ai toujours pensé que cela était en partie dû à ses premiers mois de vie, avant que nous l’accueillions dans notre famille. Je l’ai écrit dans son portrait, Clément s’est trouvé orphelin très tôt. Sa mère n’a probablement pas eu le temps de lui enseigner tout ce qu’elle aurait dû lui montrer. Il a donc été élevé par des humains, mais en plus, dans sa plus tendre enfance, il a été en contact avec ma nièce la plus âgée qui, à l’époque, n’avait que deux ans. On aurait dit qu’en la voyant se développer à un rythme comparable au sien, à ce moment-là de sa vie, il l’avait pris comme modèle.
Ainsi, bébé chat ne voulait pas boire dans un bol. Ainsi, il ne voulait pas manger, sauf si nous étions nous-mêmes en train de manger. Ainsi, il voulait toujours être à notre hauteur. Ainsi, il ne savait pas se nettoyer avec sa langue. Au moins, il n’a pas eu de problème à comprendre le principe de la litière…
Bien qu’il voulait être à notre hauteur, chaton n’aimait pas que nous le prenions dans nos bras pendant les trois-quatre premières années de son existence ; il gigotait sans cesse jusqu’à ce que nous le déposions ou qu’il se jette hors de nos bras. Toutefois, attention, adorable Clément ne savait pas tomber sur ses pattes ! Oh non ! Il se laissait choir sur le côté, peu importe s’il sautait ou si nous le laissions aller à une faible distance du sol ou non. Il s’était tout de même amélioré avec les années et nous avions également compris qu’en le laissant aller d’une certaine façon, il avait plus de chance d’atterrir sur ses pattes.

Éventuellement, notre chat a appris à apprécier le point de vue différent que nous lui offrions en le prenant dans nos bras ou en le plaçant sur notre épaule au point où il recherchait ces occasions. Comme quand Clément était impossible dans la cuisine, je le prenais dans mes bras et je lui montrais ce que j’étais en train de préparer. Une fois posé au sol, il était beaucoup plus calme, car il avait vu ce qui se tramait au-dessus du comptoir ! D’ailleurs, il ne sautait pas sur le comptoir, sauf une ou deux fois, et je me compte chanceuse que ça ne l’intéressait pas. Ça aurait été pas mal plus difficile de cuisiner avec un chat dans les pattes sur le comptoir qu’avec un chat dans les pattes sur le plancher…
Au lieu de sauter sur le comptoir, notre petit roi préférait se tenir debout, pleinement étiré, en s’appuyant contre le comptoir de cuisine. Il faisait toujours cela lorsque nous sortions n’importe quoi du réfrigérateur et surtout, lorsqu’il reconnaissait la forme d’une canne de thon ou d’un carton de lait. Clément était assez grand comme chat et ses pattes atteignaient le dessus du comptoir. Quand je le voyais faire, ça me rappellait toujours l’image d’un enfant trop petit pour voir le dessus du comptoir et qui s’étire malgré tout pour tenter de voir, de saisir ce qu’il y a sur le comptoir. C’était mignon comme tout… et aussi très ennuyant, puisqu’il a cassé bien de la vaiselle, en en saisissant le bord ainsi ! Nous avons dû apprendre à tenir loin du rebord du comptoir toute chose fragile. Cette nouvelle habitude apprise a un côté pratique, parce qu’il y a aussi moins de chance pour nous, humains, de faire tomber l’article en question s’il n’est pas trop près du bord… Leçon anodine que vivre avec un chat peut nous apprendre ! Malheureusement, je ne pense pas n’avoir jamais pris de photo ou de vidéo de ces moments ; ils faisaient partie de notre quotidien et arrivaient si fréquemment, à ce moment, cela ne semblait pas pertinent de les pérenniser.
Dans les choses que bébé chat n’avait pas appris de sa mère, il y avait le contrôle de ses griffes et l’usage de ses canines. Il ne savait pas quand rétracter ou sortir ses griffes et mordait plus que bien des chats, ce qui nous a occasionné nombres d’estafilades et de coupures. Il a quand même acquis une certaine maîtrise avec le temps et la pratique. Cependant, ce fut un long processus, pas toujours plaisant autant pour les humains que pour le chaton. En effet, il se prenait les griffes dans des positions improbables dont il n’arrivait pas à se dépêtrer sans notre assistance et, parfois, ça prenait le deuxième humain pour venir à sa rescousse, surtout quand il était pris dans les vêtements de mon conjoint ou de moi ! N’empêche que dans la plupart de ces situations, Clément affichait une réserve et un calme qui facilitait sa libération. Pas à tous les coups, parfois, il paniquait quand même, mais en général, il comprenait que nous voulions l’aider et que ça se réglait plus rapidement s’il ne tirait pas de son côté. Quand je parlais de nous faire confiance dans le dernier article, en voilà un autre exemple !
En plus de tout cela, notre vieux chaton semblait vouer un grand respect pour tout ce qui était en vie, bien qu’il avait aussi des instincts de chasseur. Quand il blessait par accident une araignée à longue patte, il ne comprenait pas pourquoi celle-ci cessait de bouger avec quelques pattes amputées. J’ai fini par prendre pitié des araignées et à tenter de distraire mon brusque, mais bienveillant félin loin de celles-ci si j’en apercevais une à sa portée. Pas que j’aime particulièrement les araignées, au contraire! Néanmoins, j’apprécie le service qu’elles nous rendent de manger pleins de petits insectes et je n’aime pas les morts inutiles. Clément ne pensait pas à manger une araignée et n’aurait pas su l’achever pour la tirer de sa misère. Il la blessait sans faire exprès, puis, il s’en désintéressait tout simplement, mais semblait le faire avec regret… Il n’a d’ailleurs pas ou peu mangé de mouches, bien qu’il adorait courir et sauter à leur poursuite. Qu’il devenait fou quand une mouche se frayait un chemin dans la maison !
Il faut que je mentionne ici que Clément était facilement distrait. Nous gagnions presque toujours les compétitions de qui détourne le regard en premier et ce, pendant plus de dix ans je dirais. S’il s’attaquait à un objet que je ne voulais pas qu’il touche, je n’avais qu’à saisir une ficelle, un lacet, un petit quelque chose, et à lui mettre sous le nez pour le détourner. Cependant, cela ne fonctionnait que si l’objet d’intérêt n’était pas quelque chose qui l’intriguait énormément. Dans ce cas-ci, la distraction ne fonctionnait que pour un court instant de répit, mais parfois, c’était tout ce que ça prenait pour placer l’objet hors de sa portée.
Clément était également très expressif surtout dans le regard. Je pense que les photos partagés à travers les pages de ce blog illustrent une bonne gamme jusqu’à maintenant des expressions de Clément. De celles plus douces, plus posées, à celles plus coupantes, plus insolentes, plus renfrognées, voire irritées. J’ai déjà mentionné dans un autre article que chaton était relativement peu vocal. Peut-être était-ce pour cela qu’il avait un visage si expressif. Il avait certains regards entre autres qui me rappelaient ma nièce justement et ça paraît impossible, et pourtant…




Voilà en gros pourquoi je trouve que Clément agissait comme un mini-humain, tout en étant d’un autre côté tellement typiquement chat. Ma plus jeune soeur l’a bien résumé, je trouve, lors d’un récent échange que nous avons eu dans les dernières semaines : « Un chat trop chat. Un chat trop humain. » Cela décrit bien notre Clément.
J’aimerais dire que toutes ces impressions apparentant le comportement de notre chat à celui d’un human sont entièrement de l’anthromorphisme de notre part, et je suis certaine qu’il y en a là-dedans. Cependant, c’était un commentaire qui revenait souvent parmi plusieurs personnes ayant eu la chance de passer beaucoup de temps avec lui. Combiné au fait qu’il a été presqu’entièrement socialisé avec des humains seulement, ça ne me semble pas très tiré par les poils.
Alors, un chat tellement humain, mais tellement chat, c’est comme ça que je choisis de me souvenir de mon cher Clément !




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