Deuil en cours
Le solstice est passé. Le printemps est officiellement fini. Voilà l’été. Nous avons traversé une saison entière sans Clément à nos côtés, aussi invraisemblable cela puisse-t-il paraître ! Eh bien, le passage d’une saison à l’autre semble se faire plus en douceur que la première transition saisonnière vécue depuis son décès. Un nouveau quotidien s’esquisse, bien que la majorité de ses aspects ressemblent à ceux du quotidien d’avant, d’avant le bouleversement, le chamboulement, le soulèvement… Tant de similarités, et pourtant, toute la différence marquée par l’absence de notre vieux chaton. Je me sens parfois encore incrédule face à cette réalité. Manger, lire, dormir, travailler, marcher, échanger, écrire, dessiner, cuisiner, faire les emplettes, ranger, nettoyer, continuer. Les mêmes activités, mais avec variations sur le thème, sur le rythme, sur la gamme. Film, petits plats, couverture, trottoir, bureau, roman, téléphone, journal, crayon, sacs, balai, les mêmes accessoires aux échos méconnaissables. C’est comme passer d’un monde en couleur à un entièrement monochrome.
Par moment, tout est plus fade, puis tout devient trop vivide. D’un extrême à l’autre, je vacille sans toutefois perdre pied. Abandonner ne paraît pas comme une option, alors j’avance, essuyant les embruns qui me balaient, profitant des surfaces planes pour reprendre mon souffle. Ouf ! Avec ce printemps qui s’est achevé, je relâche une profonde expiration. Il y a quelque chose de rassurant à ce cap contourné. Autant j’avais anticipé avec appréhension la transition de l’hiver au printemps, autant on dirait que j’accueille l’été avec un espoir renouvelé. Peut-être est-ce parce que j’ai réalisé cette semaine que tout l’amour que je ressens pour Clément et tout l’amour qu’il m’a offert en quinze ans m’habitent toujours et m’accompagera sans aucune doute pour le reste de ma vie. Surtout, je me suis aperçue que tout cet amour m’a porté de semaine en semaine, de mois en mois, durant ce premier printemps dont Clément n’a pas été témoin. Je puise des forces à même cette source, intarissable j’ose espérer, qu’il a laissé derrière lui.
Ainsi, une nouvelle force semble avoir élu domicile en moi. Nouvelle vraiment ou reconstruite simplement ? Je ne saurais dire, mais je l’approche comme une chose neuve et fraîche. Les sanglots n’ont pas pour autant totalement disparu, la tristesse demeure aux aguets, cet équilibre est fragile. N’empêche que j’entame cette nouvelle saison le coeur plus serein. Je sais bien qu’il y aura des jours plus difficiles, où l’absence de bébé chat se manifestera bruyamment. Néanmoins, je me sens plus solidement ancrée, il en prendra beaucoup plus pour m’emporter dans les afres du goufre dorénavant, du moins, est-ce l’impression que j’ai. Nous verrons bien si elle s’avére exacte.
Parfois, on se demande si l’été sera particulièrement mémorable ou non, espérant pour le premier cas, appréhendant la probabilité du deuxième. Je sais que d’une façon ou d’une autre, cet été sera mémorable pour moi parce que c’est le premier depuis longtemps qui n’incluera pas les sorties dans la cour avec Clément, qui ne sera pas marqué par mes inquiétudes en période de canicule pour son bien-être, et où aucune culpabilité n’accompagnera les déplacements de quelques jours hors de la maison. Peu importe ce que je ferai ou ne ferai pas, cet été restera dans mes annales. Peut-être donnera-t-il le ton pour les suivants ? Peut-être sera-t-il unique en son genre ? D’une façon ou d’une autre, il sera marquant, ne serait-ce que par le fait que Clément ne le vivra pas.
Je publierai sans doute un retour sur mon printemps, particulièrement en lien avec les objectifs que je m’étais fixés, mais j’ai manqué de temps ou peut-être d’envie de m’asseoir pour dresser le bilan complet pour l’instant. Je ne me suis pas non plus encore fixé d’objectifs pour l’été, toutefois, j’ai quelques idées. J’arrive de plus en plus à me projeter dans le futur ; pas très loin pour l’instant, un modeste début tout de même encourageant. Somme toute, je dirais que j’ai fait ce dont j’avais besoin pour ce printemps et je compte poursuivre sur cette lancée pour l’été.
J’espère que vous avez bien profité du printemps de votre côté et j’en profite pour vous souhaiter un bel été confortable.




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