Miaougraphie de Clément

Deuil en cours
Cela faisait partie de mes objectifs depuis le milieu du printemps, j’en ai glissé quelques mots déjà, et aujourd’hui, je dresse un petit bilan des progrès sur ce plan. Je parle du réapprivoisement de notre cour extérieure sans félin à (pour nous) superviser. Ça s’annonçait comme un défi de taille déjà en partant, tellement notre usage de la cour était liée à Clément, puis, les conditions environnementales (fumées, chaleur excessive, et pluies diluviennes) ont semblé se liguer contre nous. En fait, les éléments continuent à limiter nos sorties avec des précipitations abondantes et des conditions propices à la formation d’orages. Ce n’est pas tous les jours, mais suffisamment fréquent, qui plus est, la température fraîche réduit le besoin de prendre l’air.

Malgré tout, nous n’avons pas complètement déserté la cour cet été. Le retour dans la cour a peut-être été un peu tardif puisque ce n’est qu’en juillet que nous avons commencé, mon conjoint et moi, à l’investir. Toutefois, il semble solide. Une chose qui a grandement aidé à profiter de notre cour extérieure a définitivement été la visite de notre couple d’amis en début juillet. Nous avons passé deux belles soirées à manger et à papoter dehors jusqu’à tard dans la nuit à la lumière de notre lampe de camping et du luminaire extérieur de notre voisin du haut. Notre lampe donnant un étrange halo vert, cela nous nimbait d’une drôle de teinte, comme si nous étions réunis autour d’un feu de camp émettant une lueur verdâtre. Cette atmosphère particulière a contribué à graver dans ma mémoire deux soirées magiques qui m’ont permis d’établir de nouveaux repères dans notre cour. Être bien entourée et avoir beaucoup de plaisir, ça facilite grandement les choses, non ? Je ne peux parler pour mon conjoint sur si ces deux soirées ont joué un rôle aussi important que pour moi dans la reprise de nos activités dans la cour pour ce premier été sans Clément. Néanmoins, je peux concevoir que ça a dû aidé un petit peu au moins. Depuis, nous avons joué quelques parties de cribbage et de backgammon dehors tous les deux et j’ai rejoint mon conjoint quelques fois, pendant qu’il profitait de la cour déjà, pour lire ou parler. Autrement, je n’ai pas vraiment passé de temps seule dans la cour jusqu’à maintenant, sauf pour des tâches précises tel que sortir le recyclage ou nettoyer la table.

Même avant le décès de notre chat, mon conjoint passait plus de temps dans la cour que moi et c’est parti pour continuer comme cela cette année. J’avoue que ça me rassure quelque peu de constater qu’il arrive à réinvestir la cour, parce que je craignais que ce soit encore plus difficile pour mon conjoint de profiter de la cour sans Clément que pour moi. En effet, si Clément et moi avions établi notre repaire dans la yellow room, faisant de cette pièce un symbole de ma relation avec bébé chat, je dirais que pour mon conjoint et Clément, leur lieu de prédilection où ils ont partagé un tas de moments privilégiés juste tous les deux, c’est la cour extérieure. Je sens que ça n’a peut-être pas été aisé pour lui, mais il semble pouvoir occuper la cour à nouveau régulièrement. De mon côté, je n’avais déjà pas l’habitude de sortir dans la cour fréquemment avant ; la configuration de l’espace, mes passe-temps favoris et les angoisses passées causées par les évasions de Clément font que je ressens peu l’envie de l’utiliser. Ainsi, les quelques soirées passées et excursions dans la cour que j’ai faites depuis le début du mois de juillet me paraissent suffisantes pour déclarer que le réapprivoisement de la cour extérieur progresse bien, surtout compte tenu des obstacles semés par un été inconstant.

J’espère que ça se poursuivra comme cela et il y a quelques activités que je veux réaliser d’ici les premières neiges qui devraient contribuer à cette progression. D’abord, comme mentionné dans cette Miaougraphie dessinée de juillet où je vous ai montré le portrait de Clément que j’ai réalisé à la craie, j’aimerais utiliser l’asphalte de la cour comme tableau pour quelques crayonnés de notre petit roi. Je ne l’ai toujours pas fait, dû à un mélange de température capricieuse et de manque de motivation, mais je compte bien y remédier. Puis, j’aimerais réorganiser le mobilier de la cour comme je pense en avoir fait mention auparavant. Sur ce plan-là, une nouvelle table, plutôt énorme, presque littéralement tombée du ciel, est venue compliquée les avancées. C’est un don de notre voisin du haut qui l’avait acquis pour son balcon fraîchement agrandi et qui finalement la trouvait trop grosse pour son balcon… ce qui est tout un adon parce que je me disais que cette année serait l’année où j’achèterais une table pour manger et jouer dans la cour (nous avons juste une petite table pliante) ! Néanmoins, ce n’est pas tout à fait le genre de table que je cherchais. j’aurais de loin préféré quelque chose de pliable jusqu’à un certain point, qui ne prendrait pas trop de place et serait assez simple à ranger. N’empêche que nous l’avons eu gratuitement et qu’elle est très belle, donc, je ne m’en plains pas. D’une façon, sa seule présence réorganise l’espace de la cour du tout au tout. Seulement, la façon dont tout est placé ne me plaît pas vraiment et sa taille rend le remaniement du mobilier plus difficile. Nous finirons par nous y atteler. Dans le pire des scénarios, ce sera lors des préparatifs pour transformer la cour en stationnement temporaire d’hiver et, dans le meilleur, ce sera fait d’ici la fin du mois d’août.

Enfin, la réoccupation de la cour extérieure ne se fait pas sans que j’aie une pensée pour Clément. Ainsi, presque chaque fois que je passe un peu de temps dans la cour, je me rends à la côture où notre magnagnime souverain a paradé/patrouillé bien souvent durant sa vie adulte (clairement, il arrivait à réaliser les deux en même temps) et je fais résonner le délicat tintement du grelot que nous avons accroché à l’aide d’un ruban à l’une des lattes de la côture lors de notre rituel funéraire de mars. Je le fais aussi parfois de l’extérieur de la cour, quand je rentre à la maison, mais j’y pense bien moins souvent quand je suis sur le trottoir contrairement à quand je fréquente la cour. Je ne sais pas pour combien de temps nous laisserons le ruban à cet endroit. Je ne sais pas pour combien de temps le glas continuera de sonner en mémoire de Clément. Néanmoins, je peux confesser que ce petit drelin métallique apaise mon petit coeur meurtri. D’ailleurs, avant de publier ce texte, je n’ai pu m’empêcher d’aller faire un tour dans la nuit faire tinter le grelot.

Voilà comment se déroule jusqu’à maintenant notre « vie de cour » estivale sans bébé chat. Les contours de notre espace extérieur ont irrémédiablement changé et sont encore un peu flous. Le défi est de trouver comment occuper la cour sans se faire ensevelir sous les souvenirs évoquant Clément et sans effacer ses derniers pour autant. Après tout, notre noble félin ne se pavane peut-être plus dans cette cour, mais il continue d’arpenter nos coeurs.