Deuil en cours
Je déclare la chasse officiellement ouverte. De quelle chasse s’agit-il, vous vous demandez. Non, je ne sors pas carabine ou arbalète. Je ne viserai ni écureuil ni oie ni chevreuil cet automne, ne vous inquiétez pas. Ce n’est pas une chasse aux sorcières non plus, bien que je garderai mes yeux grand ouverts tendus vers le ciel durant ces nuits qui s’allongent. L’automne sonne le retour de la noirceur et plus il fait noir, plus il est aisé de distinguer la dame Aurore valsant à travers le firmament durant une de ses visites occasionnelles.
Je vous avais déjà parlé de mes premières expériences de chasse aux aurores boréales le printemps dernier. Je les ai mis quelque peu en pause cet été, puisque les opportunités sont plus rares durant la période estivale. J’ai quand même gardé un oeil sur les groupes que je suis et sur le site Web de la météo spatiale canadienne. J’ai d’ailleurs manqué une ou deux belles occasions que je ne soupçonnais pas, parce que je n’étais pas très assidue. Toutefois, comme de raison, il y a eu peu d’événements majeurs cet été côté aurores boréales. J’attendais avec trépignation l’arrivée de l’automne et des longues nuits. Dés septembre, j’ai commencé à reprendre mes habitudes de surveiller plus régulièrement la météo spatiale, malheureusement sans grand succès, malgré la survenance de quelques événements assez majeurs. Il faut dire qu’il y a eu des nuits nuageuses dans mon coin lors des premiers grandes activités géomagnétiques de la saison, autour du 18-19 septembre dernier.
Bref, avec les heures d’ensoleillement qui diminuent, je me remets en mode chasse nocturne. N’empêche que je ne suis qu’une chasseuse très amatrice et plutôt occasionnelle. Je ne peux pas trop sauter d’heures de sommeil durant la semaine et je peux difficilement quitter la ville seule la nuit. Mes opportunités sont limitées par ces conditions, ce qui ne me décourage pas pour autant et j’essaie de saisir toute chance que j’ai d’avoir une nuit très noire pour observer les phénomènes célestes nocturnes. D’ailleurs, j’avais espoir de contempler de magnifiques ciels étoilés durant notre week-end de camping, du 7 au 9 octobre, espoir qui s’est buté aux relents d’une tempête tropicale qui passait par là elle aussi, sans doute pour admirer l’avancée des couleurs automnales comme tout le monde. De toute façon, cela n’a pas gâché le plaisir de camper avec mes amis dans un joyau de parc près duquel j’ai la chance d’habiter. Il y a eu pleins d’autres choses à voir et faire durant ces quelques jours qui ont passé si vite.
Bien qu’il n’y aura peut-être pas d’occasions aussi belles que celle de se trouver deux nuits dans un parc national assez éloignée des grands centres urbains pour offrir une nuit d’un noir profond, cela ne m’empêchera pas de rester aux aguets entre cet automne et le printemps prochain pour observer quelques phénomènes célestes intéressants, et pas seulement des aurores boréales ! En effet, il n’ y a pas que les aurores boréales à admirer dans la nuit, quoi que j’admets que ça demeure mon sujet de chasse de prédilection. Ainsi, sans avoir aperçu le bout du nez d’une aurore cet automne encore (bien que je soupçonne un ou deux soirs, les avoir saisi pâlottes à l’horizon, mais avec trop peu de certitudes pour pouvoir trancher), j’ai tout de même pu observer Jupiter à l’oeil nu ainsi qu’avec l’aide de ma caméra plusieurs soirs de suite à la fin du mois de septembre/début d’octobre. Le premier soir, ce fut un hasard total. C’était la pleine lune des moissons et mon conjoint et moi avions pris un moment pour observer de notre porte d’entrée la lune déjà haute dans le ciel. Mon conjoint a commenté sur un point très brillant apparaissant quelque peu sous la lune, décrétant que c’était probablement un satellite humain.
Mes neurones se sont activées ; ce n’est décidément pas normal qu’un corps céleste, artificiel ou non, scintille tant malgré la proximité relative dans notre ciel à une lune vibrant de milles feux. Je me rappellais vaguement avoir lu quelque chose à ce sujet sur la charte des constellations que j’avais ramassée le printemps dernier dans le parc national d’Elk Island, en Alberta, particulièrement sur les planètes du système solaire visibles à l’oeil nu. Alors, je sors ma charte et je lis la section sur les cinq planètes visibles par moment, Vénus – ça pourrait être celle-là qui est très brillante, mais la position dans le ciel ne semble pas convenir ; Mars – éliminé de facto, pas la bonne couleur ; Mercure – sa proximité du soleil semble l’éliminer aussi ; Saturne – pâle et jaunâtre, la description ne ressemble pas ; mais oh Jupiter, là, ça pourrait. Jupiter apparaît comme un corps céleste large blanc-jaunâtre qui brille plus fort que tout autre astre dans la nuit ! Je sors ma caméra numérique qui a un zoom assez décent et en effet, en élargissant, un petit disque grisâtre et brillant est perceptible. Presque comme une lune miniature. En vérifiant sur le Web, je trouve des informations confirmant que Jupiter à cette date se levait proche de la position relative de la Lune au-dessus du ciel du Québec. J’ai réussi à prendre quelques photos avec ma caméra numérique. Elle a un bon zoom, mais c’est quand même très flou, surtout que je ne suis pas en mesure d’utiliser mon trépied en ce moment. J’ai quand même pris gran plaisir à observer de plus près cette lointaine géante. Voici quelques-uns des clichés que j’ai saisis durant ces soirées d’observation.






Pour la première photo ci-dessous, je ne savais pas encore que c’était Jupiter le point très lumineux à la gauche de la lune. Ensuite, les photos sur lequel un seul astre apparaît, c’est bien Jupiter qu’on aperçoit. On ne perçoit pas vraiment les zones ceinturant la planète, mais on les devine quelque peu. Une chose est certaine, que j’attrape au passage les couleurs et le mouvement d’aurores boréales dans les prochains mois, j’aurai au moins continuer à travailler ma capacité à prendre des photos nocturnes et j’avoue que ça m’amuse beaucoup.
Je vous rappelle les outils auxquels je me réfère pour surveiller les opportunités d’observer une aurore boréale.
- Le site de météo spatiale canadienne
- La webcam live du projet AuroraMax localisée à Yellowknife, très au nord
- La webcam live d’Athabasca University, à Athabasca, Alberta
Le site web de la météo spatiale canadienne est assez basique comparée à celui de l’organisme américain. Toutefois, justement, il est un peu plus facile et rapide à naviguer. Je n’ai pas encore appris à me servir de tous les indices requis pour prévoir la probabilité que les aurores dansent dans mon coin pas si nordique que ça (le bZ entre autres, je ne sais même pas où trouver la valeur actuelle de cet indice). En effet, l’indice K n’est pas suffisant puisqu’il ne mesure que la force de l’activité géomagnétique, sans tenir compte de la direction et la force des vents solaires. (Un K élevé ne veut pas automatiquement dire qu’il y a des aurores boréales visibles, puisque sans vent ou si les vents poussent les particules dans la mauvaise direction, elles ne danseront pas dans notre bout du ciel).
Cependant, en combinant à la fois les prévisions et valeurs actuelles de l’indice K affichée sur la carte zonale de la météo spatiale canadienne avec les informations disséminées sur quelques groupes Facebook actifs d’autres « chasseurs » tout en gardant un oeil sur ce qui se passe sur quelques webcams en direct, j’arrive à cerner les probabilités de visibilité. Il m’est arrivé de sortir quand même sans activité probante sur ces autres sources, si le K était très élevé. Il faut dire qu’avec le décalage entre certaines de mes sources et moi (2 à 3 heures de différence avec ce qui se passe dans les Territoires du Nord-Ouest ou l’Alberta et chez moi), il fait noir plus tôt de mon côté. Niveau webcam, celle d’AuroraMax n’a pas été réactivée. Elle aurait dû l’être dans le courant de septembre, toutefois, cela a été reporté à cause des feux de forêt ravageant cette portion du pays encore. On ignore quand elle reviendra en direct. En attendant, j’ai ajouté à ma liste une plus proche de chez moi, en Abitibi-Témiscamingue, région à l’ouest de la province du Québec et un peu plus au nord que ma ville.
Si c’est mieux encore de les voir directement devant soi ou au-dessus de sa tête, les webcams permettent de profiter du spectacle en direct, comme sur les captures d’écran que j’ai enregistrés le 18 septembre dernier. Je vous invite à y jeter un oeil de temps à autre (considérer le décalage horaire, il fait encore nuit au Québec et en Alberta quand plusieurs d’entre vous, outre-Atlantique, se lèvent).



Par ailleurs, en préparant cet article, je constate qu’il y a eu de l’action dans la nuit du 12 au 13 octobre, du moins dans l’Ouest canadien. La dame était de sortie et avait revêtu ses habits les plus scintillants. C’est pour dire comment les prévisions peuvent changer rapidement, j’avais pourtant jeter un oeil aux conditions hier soir avant de me coucher. Tous les indicateurs étaient en vert pour au moins 24 heures. J’apprends également qu’il y aura une éclipse partielle aujourd’hui (encore demain pour moi) vers midi, visible du Québec. Je vous laisse le lien d’un article sur le Monde qui détaille plusieurs événements célestes à venir dont une nouvelle opportunité de facilement observer Jupiter près de la lune vers le 28 octobre. Pour ma part, je note la proximité de la lune gibbeuse et de Saturne les 23 et 24 octobre prochain.
Alors, voilà, la chasse est ouverte, depuis un moment déjà, et se poursuivra au cours des prochains mois. Le défi sera d’équilibrer la chasse avec des heures de sommeil de qualité. J’espère avoir la chance d’observer une ou deux aurores ainsi que quelques phénomènes célestes d’intérêt et qui sait, j’apercevrai peut-être, entre deux étoiles, un bout de queue touffue, une fine oreille pointue, un petit museau rose, une trace de mon Clément adoré, à défaut de découvrir un météore ou une comète qui pourrait porter son nom (je ne suis vraiment pas équipée pour même prétendre chercher un de ces corps célestes…).




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