Tranche de Miaougraphie illustrée
L’Halloween est une période que j’affectionne énormément avec ses déguisements, ses décorations, ses histoires fantastiques, ses bonbons, surtout les bonbons ! Quand nous avons emménagé dans notre logement actuel, le premier qui n’était pas dans un immeuble à logement avec entrée partagée, l’une des premières choses à laquelle j’ai pensée c’est que je pourrais enfin décorer pour l’Halloween et distribuer des bonbons aux enfants du quartier. C’était important pour moi de redonner après tous ces Halloweens passés, enfant, à dévaliser maison après maison de leurs friandises. J’ai tellement de beaux souvenirs liés à cette fête, j’aime l’idée de participer à mon tour à la création de ceux d’une autre génération et Clément était un excellent petit assistant pour cela.
Le premier véritable Halloween de Clément avec nous ne survint donc pas durant le premier automne qu’il a passé avec nous, celui où il célébrait son premier anniversaire, puisque nous n’avons pas distribué de bonbons lorsque nous restions à Montréal. Ce n’est que lors de son troisième automne, en 2010, que Clément a vécu la pleine expérience d’Halloween. Ce fut un début assez timide. Je ne pense pas avoir été costumée pour remettre les bonbons cette année-là et j’avais tout juste une citrouille, la première que j’ai taillée à vie je pense bien, ainsi qu’un petit épouvantail que j’ai fabriqué avec des retailles de tissu et dont je vous ai partagé des photos avec Clément lors de l’action de grâce canadienne. Le peu de préparatifs n’était pas si mal compte tenu qu’au final, presqu’aucun enfant ne s’est arrêté à notre porte. Il faut dire qu’il y a peu de gens qui décorent dans notre coin du quartier et peu de familles qui y demeurent, encore maintenant. Cet automne-là, mon conjoint et moi avons mangé des bonbons pendant des semaines après, une chance que j’avais un minuscule budget et acheté peu de bonbons.

Durant les années qui ont suivi, les résultats ont varié fortement. Il y a eu une ou deux éditions où nous avons presque manqué de bonbons, quelques autres où moins de dix personnes ont passé à notre porte, et le reste quelque part entre les deux, tout dépendant de la température et du jour de la semaine sur lequel l’Halloween tombe. La distribution de bonbons a été interrompue causée par la pandémie en 2020 et 2021.
Lors de la première distribution de bonbons, ayant eu à ouvrir la porte peu de fois, je n’ai pas eu à trop m’inquiéter de Clément qui pourrait tenter de se faufiler par la porte ouverte… Les Halloweens se sont succédés et j’ai réalisé que je n’avais pas me soucier de cela… la majorité du temps du moins. Voyez-vous, Clément ne savait trop comment réagir face à ces étrangers bizarrement vêtus et maquillés qui sonnaient ou cognaient à notre porte. Ça ne l’empêchait pas d’accourir à l’entrée dès que ça sonnait ou cognait, ce jour-là, mais il gardait ses distances de la porte lorsqu’il voyait les petits monstres et sorcières qui se tenaient devant, sauf lorsqu’un groupe plus important requérait de laisser la porte ouverte plus longtemps. Là, il s’engaillardissait parfois à s’approcher un peu plus.

Pendant que je distribuais bonbons et chocolats, Clément lui recevait des regards gênés, des exclamations de joie et même souvent des compliments. Quand il s’approchait un peu trop, il se faisait même flatter quelques fois, mais pas trop, il n’était pas un chat très câlineux, en tout cas, pas avec les gens qu’il ne connaissait pas bien. Je le surveillais d’ailleurs de près, sachant qu’il avait toutes ses dents, toutes ses grifffes et savaient s’en servir.
Alors, est-ce que Clément aimait l’Halloween ? La réponse est nuancée. Sa curiosité était satisfaite par toutes ces personnes qui défilaient à notre porte et nos fenêtres dans leurs accoutrements variés, toutefois, l’excitation le rendait un peu nerveux par moment. Il n’avait pas l’habitude d’autant d’animation à la maison. Notre vieux chaton devait trouver nos coutumes étranges et surtout détonnantes de nos habitudes régulières. Une chance que ça n’arrivait qu’une fois par année. Néanmoins, il appréciait aider dans les décorations. Quand je taillais ma citrouille, installée sur le plancher généralement, il me tournait autour et sentait tout ce que je sortais de la citrouille. Il aimait moins que j’installe dans ses fenêtres des décorations qui prenaient souvent beaucoup, voire toute sa place. Certaines décorations qui revenaient d’année en année lui étaient devenues familières et il semblait tout de même apprécier les retrouver, comme son ami l’épouvantail. Il était toujours intéressé par les nouvelles citrouilles. Cependant, c’était très difficile pour moi d’obtenir une belle photo de Clément posant auprès de la citrouille comme il était trop occupé à la sentir et l’inspecter.
Enfin, nous arrivons à l’automne passé, son ultime automne avec nous, et le premier sans mesures sanitaires. Personnellement, je n’étais pas prête à distribuer des bonbons à nouveau à des enfants faisant du porte à porte, mais mon conjoint a insisté et je l’ai laissé faire, en précisant que c’était à lui et lui seul d’aller à la porte. Trois ans après sa précédente expérience halloweenesque, notre vieux chaton a renoué avec la tradition annuelle une toute dernière fois, bien que l’idée était loin de nous. Peu après sa mort, j’ai repensé à cet Halloween et j’ai remercié mon conjoint d’avoir insisté pour reprendre la distribution des bonbons et avoir ainsi permis à Clément de vivre une ultime fois cette étrange fête qui piquait toujours son intérêt avec ces costumes d’Halloween, ces friandises, ces décorations et ces petits humains qui gambadaient et criaillaient le temps d’une journée, le temps d’un soir.

Cette édition 2023 de l’Halloween sera la première où nous ouvrirons la porte aux petits diablotins quémandant leurs sucreries sans avoir à nos côtés notre royal félin. Les habitués, s’il y en a qui passent, s’apercevront probablement de son absence. Où est passé le curieux rouquin qui assistait toujours à la distribution des bonbons à notre adresse ? Il n’est plus de ce monde, mais si on en croit tout le foklore autour de cette fête, sa présence se fera peut-être sentir encore plus clairement durant cette période où les frontières entre les mondes s’amincissent. Cette idée me conforte. Nous aurions pu sauter une année à nouveau et ne pas décorer, ne pas acheter de bonbons, fermer les lumières et se cacher sous une couverture le soir venu, mais je sens au contraire la nécessité de partager du plaisir et de répandre du merveilleux en ce jour d’Halloween qui approche à grands pas.
J’ai promis une tranche de miaougraphie illustrée au tout début et la voilà pour conclure. J’ai eu envie de retravailler le portrait en craie sur tableau noir de Clément que j’ai esquissé durant l’été avec un motif festif. J’ai ainsi dessiné une grosse citrouille sur laquelle mon vieux chaton peut reposer ses pattes qui semblaient autrement suspendues au-dessus du néant. Ça m’a fait rire de penser que je pouvais enfin réaliser mon envie d’avoir un joli portrait de Clément aux côtés d’une citrouille, même si les poils de chaton ne sont que traits de craie sur un fond noir de jais. Je ne sais pas encore ce que j’en ferai après l’Halloween et l’automne. L’effacer pour en dessiner un nouveau ou transformer la citrouille autrement ?





Répondre à Isa Annuler la réponse.